Bientôt
cinquante années
Un quai inondé
de soleil, un paquebot secoué par la houle
Traumatisée,debout ou assise sur des valises, cette foule
Obligée de quitter leur si belle région menacée
par les armes
Les petits comme les grands désemparés ont les yeux
remplis de larmes.
Difficilement ils grimpent sur la passerelle avec leur grand sac
S'accrochant à la corde servant de rampe, secoués par
le ressac
S'étreignant les uns aux autres rapprochés par cette
terrible douleur
Scrutant ce ciel, qu'ils ne reverront plus,avec cette unique couleur.
Ce grand paquebot balloté par les vagues de cette mer si belle
Crie lui aussi sa colère et son désarroi à coups
de décibels.
Longtemps il continue de gémir sous la poussée des grosses
turbines
Patient prenant tout son temps voulant ignorer ce monde qui décline.
Puis doucement, comme à regret il quitte le quai d'Alger la
blanche
Avec accrochée au bastingage la foule qui pleure et flanche.
Agitations larmes cris injures parfois, elle agite les mouchoirs
Sachant bien que ce sont des adieux définitifs et non un au
revoir.
Que de pensées dans la tête de toutes ces personnes traumatisées
Éparpillées dans des régions différentes,
totalement dépaysées
La côte découpée, joli coin de verdure, s'éloigne
lentement
Elle restera dans la mémoire de tous toute la vie évidemment
Étrange et tragique destin que subissent certaines générations
Il faut parfois des décennies pour se remettre de cette situation
Maurice Adam