Fondé en 1885,
sous la direction du regretté Ch. Trépied, l0bservatoire
national dAlger est un des plus remarquables établissements
scienti?ques de ce genre. Grâce à l'activité et à
la haute compétence du Directeur actuel, M. Gonnessiat, les travaux
les plus divers et les plus importants sy accomplissent avec une
remarquable régularité. En première ligne, citons
la grande uvre internationale du Catalogue photographique et de
la Carte du ciel, à laquelle lObservatoire de Bouzaréa
coopère activement. Pour mener à bien les grandes taches
astronomiques qui lui incombent, ce bel établissement est remarquablement
outillé. Il possède une lunette méridienne pourvue
des derniers perfectionnements (oculaire automatique et chronographe imprimant
de P. Gautier), un équatorial coudé de 0 m 32 douverture,
un sidérostat de 0 m 33 douverture et dune distance
focale de 8 mètres, et un équatorial photographique de 0
m 34. Une des coupoles. de 1Observatoire est vide à lheure
actuelle mais doit recevoir incessamment un télescope de Foucault
dune ouverture de 0 m 50. Notons encore que lObservatoire
possède, depuis l'année dernière, un grand sismographe,
et que le service météorologique y est remarquablement installé.
On vient encore d'y mettre en service une antenne de télégraphie
sans ?l dune longueur de 400 mètres, qui permet de recevoir
les signaux horaires de Paris et de Hambourg.
Avec ces instruments de premier ordre, au milieu d'un cadre naturel charmant,
le savant personnel de lObservatoire travaille assidûment
à l'accroissement de nos connaissances. MM. Gonnessiat, Rambaud,
Renaux, Sy, Villatte, Baldet ne m'en voudront pas si je leur témoigne
devant le grand public algérois ma respectueuse admiration.
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Nous navons pas
la prétention dapprendre à nos lecteurs ce quest
une éclipse de soleil : les élèves des écoles
primaires le savent, cest un phénomène astronomique
produit par le passage de la Lune devant le disque lumineux de l'astre
qui nous éclaire. Le nombre des éclipses de Soleil, pour
l'ensemble du globe, est en moyenne, de deux par an : mais comme le cône
dombre traîné après elle par la Lune ne coupe
la surface terrestre que sur une zone très étroite, les
éclipses totales de Soleil pour un lieu déterminé
sont beaucoup plus rares.
Celle que nous pourrons observer aujourdhui sera totale pour les
environs immédiats de Paris: les habitants de la capitale feront
sagement de se déplacer pour la contempler car ils ne verront la
prochaine quen 1999. A la rareté du phénomène
se joint cette fois un intérêt tout spécial : les
astronomes se demandent si l'éclipse sera annulaire ou totale,
c'est-a-dire si la surface entière du Soleil sera cachée,
au moment de la plus grande phase, ou si lon apercevra encore un
mince anneau lumineux autour de la Lune. Cette incertitude vient de ce
que nous ne connaissons pas avec une exactitude absolue le diamètre
de notre satellite, la plus faible erreur suffit, en effet à produire
une différence daspect.
Quoi quil en soit, la question ne se pose pas pour Alger. A nos
yeux, si le temps est clair, léclipse sera partielle. Les
73 centièmes du diamètre du Soleil seront cachés
par la Lune, ce qui correspond à peu près à loccultation
des 65 centièmes de la surface. La Lune entrera dans le Soleil
presque exactement à lOuest, pour en sortir par le Nord,
comme le montrent les croquis ci-joints. Voici, en temps légal,
les heures des diverses phases du phénomène :
Commencement de léclipse (premier contact) : 10 h. 30 m.
28 s. matin ;
Plus grande phase : 11 h. 54 m. 20 s. m.,
Fin de léclipse (quatrième contact) : 1 h. 20 m. 13
s. soir.
Remarquons, pour les personnes qui chercheraient ces heures dans la "Connaissance
des temps" pour 1912, que cet annuaire, publié en janvier
1910, donne le temps légal adopté à cette époque,
celui du méridien de Paris, auquel il faut retrancher 9 m. 21 s.
pour avoir le temps légal du méridien de Greenwich, adopté
depuis quelque temps.
Le fait que les éphémérides astronomiques voient
le jour deux ans à l'avance, rend très peu méritoire
la publication des phases dune éclipse quelques jours avant
le phénomène. Depuis 1910, on aurait pu faire exactement
la même prédiction, et si on le voulait, on pourrait indiquer
dès maintenant les instants de toutes les éclipses jusquen
1915, puisquelles sont déjà calculées et publiées.
Les observations intéressantes à faire pendant léclipse
sont nombreuses, même les personnes ne disposant daucun instrument.
On peut suivre les phases du phénomène à laide
d'un verre fumé, remarquer les variations de la lumière
et de la température - celles-ci du reste ne seront du pas très
sensibles demain. On peut encore observer la variation de forme des images
solaires données par les trous des feuillages : ces images, circulaires
en temps ordinaire, suivent la marche de l'éclipse et prennent
la forme d'un croissant.
Les photographes essaieront de fixer, plaques autochromes, les colorations
atmosphériques ; ou bien sur des plaques badigeonnées au
dos avec un antihalo ,ils pourront tenter de reproduire le phénomène
lui-même : pour cela un appareil ayant au moins 15 ou 20 cm de foyer.
On pourra. prendre. plusieurs images du Soleil sur la même plaque,
en calant le Soleil dans le coin convenable de la plaque, et en prenant
plusieurs instantanés rapides de 5 m en 5 m.
Ces observations sont, à vrai dire, intéressantes, mais
bien rudimentaires, si on les compare à celles auxquelles on se
livre dans les observatoires. Dans l'établissement scientifique
de premier ordre qui sélève au sommet du Bouzaréa,
léclipse est attendue. Sous limpulsion du savant directeur,
M. Gonnessiat, toutes les positions sont prises depuis plusieurs jours.
Léquatorial photographique, dont l'objectif a 0 m 34 douverture,
a reçu un nouvel obturateur à guillotine qui permettra de
nombreux clichés des phases de léclipse. Aux autres
instruments, cest-a-dire a l'équatorial coudé de 0
m 32 et au sidérostat de 0 m. 33, de nombreuses observations visuelles
et des mesures micrométriques de précision donneront des
renseignements exacts sur lheure des contacts, la position des points
où ils se feront, etc. On pourra même observer le phénomène
à la grande lunette méridienne, étant donné
quil se .produira dans les environs de midi, le Soleil étant,
par conséquent très prés du méridien.
Nous profitons de cette occasion pour remercier vivement M. le directeur
de l'observatoire de lamabilité avec laquelle il nous a reçus,
et, MM. les astronomes des renseignements qu'ils ont bien voulu mettre
à notre disposition. Le public algérois leur saura gré
de nous avoir permis de mettre sous ses yeux un aperçu du grand
travail scientifique qui se poursuit sans relâche à Bouzaréa,
sans bruit, mais avec les meilleurs résultats pour la conquête
de la connaissance.
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