Les Chroniques d'Air de France
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Chapitre 5 : A l'école
Dernière mise à jour : 28 février 2025

A l'école

Le besoin d'un établissement scolaire nécessité par le développement du village et de l'accroissement de sa jeune population devenant impérieux, le Conseil Général du département d'Alger avait, dès 1936 pris conscience de cette nécessité et de l'importance de la population en âge scolaire (82 enfants), et, le 12 mai, émettait le "voeu"que soit créée, le plus tôt possible, dans la commune de Dély-Ibrahim, au lieu-dit "Air de France", une école mixte à deux classes"

Ecole de Dély-Ibrahim

Considérant que par sa situation topographique, une partie des territoires de la commune de Dély-Ibrahim vient s'enclaver dans la commune de Bouzaréa ;
Considérant que dans la partie excentrique de cette enclave il s'est formé par suite d'un lotissement heureux appelé «Air de France ». une agglomération importante comprenant 82 enfants ;
Considérant que ces enfants ne peuvent recevoir l'instruction nécessaire faute de place dans les écoles de Bouzaréa qui est
la commune la plus proche de cette agglomération ;
Considérant qu'il convient aux pouvoirs publics de remédier à cet état de choses préjudiciable à toute une population.
Emet le vœu :
Que soit créée, le plus tôt possible, dans la commune de Dély-Ibrahim, au lieu dit « Air de France », une école mixte à deux classes.
Signé : Borgeaud, Villeneuve, Aboulker.

Écho d'Alger du 18 janvier 1937

Voeu du Conseil Général paru dans l'Écho d'Alger du 14 mai 1936
La crise de 1936 ne permit pas la réalisation rapide de ce projet malgré la volonté de Monsieur Jamot, maire de Dély-Ibrahim, qui rappela ce projet dans son discours, en présence du sénateur Duroux et du préfet Bourrat, lors de l'inauguration du nouveau bureau de postes de Dély-Ibrahim.
Extrait du discours de M. Jamot, maire de Dély Ibrahim, le 17 janvier 1937
(Écho d'Alger du 18 janvier 1937)
Une "petite école" mixte à classe unique fut néanmoins rapidement installée dans un local situé à l'emplacement de l'hôtel "La Comète" des Benhaïm et un poste d'enseignant fut ouvert à la rentrée d'octobre 1937 mais pourvu avec quelque retard, le poste n'ayant été ouvert qu'au 26 octobre.

POSTES VACANTS
Enseignement primaire

Air-de-France (commune de Dély-Ibrahim). — Ecole mixte d'application à classe unique.
Les candidatures sont reçues jusqu'au 25 ,octobre (1 exemplaire de la demande sera envoyé directement à l'inspecteur d'Académie et 1 exemplaire à l'inspecteur primaire de la circonscription). Seuls les instituteurs pourront postuler pour cette école.

Écho d'Alger du 3 octobre 1937
Mais cette école s'était rapidement révélée insuffisante et lors de la rentrée d'octobre 1938, les élèves fréquentant déjà l'école furent réinscrits avant que l'inscription de nouveaux élèves soit rendue possible en fonction des places restantes.

ECOLE MIXTE D'AIR DE FRANCE. — Les parents sont avisés que la réinscription des élèves fréquentant déjà l'école aura lieu à l'école le jeudi 14 septembre de 9 à 11 heures.
L'inscription des nouveaux élèves se fera le jeudi 14 septembre de 14 à 17 heures.

Écho d'Alger du 13 septembre 1939
Il est donc très vraisemblable que quelques enfants aient pu être scolarisés et avoir accès à l'enseignement donné sous la direction de Mr Chas, à l'école annexe de l'École Normale d'Instituteurs.
Photos de classe de l'ancienne "petite" école
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Classe de Mr Chas
Les élèves de cette "petite école" reçurent donc successivement l'enseignement de Monsieur Pons, Madame Letourneux, Mademoiselle Achat et de Monsieur Chabanne avant la prise de poste, à la rentrée d'octobre 1942, de Monsieur Détrez en provenance du département du Nord.
Quelques photos de classe, datant probablement des années 1943 à 1947, que Viviane nous a confiées, sont les rares témoins de cette époque.

Quand il faisait beau, les élèves se rendaient à pied dans les jardins de certains parents, le samedi après-midi pour s'initier à la culture des fruits et légumes avec leur maître qui, eux, n'avaient pas de jardin, logés qu'ils étaient dans des appartements de fonction. Et Madame Chandelier était chargée de cette pratique qui consistait à apprendre (aux filles uniquement ?) des points de couture, à faire des boutonnières, des festons et des ourlets et à exécuter des tissages et des broderies. Toutes ces réalisations étaient ensuite fixées sur des pages de couleur sombre dans un petit cahier de couture.
Les élèves apprenaient aussi des comptines et des chansons du terroir régional de France, avec leur maître respectif, du genre : "A la claire fontaine", "Frère Jacques", "La Saint Hubert", "Le cor de Roland", "Les chants de Noël", "Les trois souris". Et, 3 ou 4 fois par an, Monsieur Détrez emmenait, à pied à l'École Normale de Bouzaréah, les élèves de la "petite école" pour chanter devant les élèves-instituteurs, tous réunis dans une sorte d'auditorium, afin de les former à leur futur enseignement dans la direction d'une chorale. C'est probablement à une de ces occasions que fut prise la photo ci-dessous.

A l'école annexe de l'école Normale, Mr Détrez et ses élèves
Cette insuffisance de classes publiques amena sans doute Madame Marie Bachelier à prendre l'initiative d'implanter une école primaire privée mixte à Air de France, fut autorisée le 20 octobre 1942 par l'Inspecteur d'Académie d'Alger.
Document en date du 20 octobre 1942 par lequel "Madame Marie Bachelier est autorisée à ouvrir une école primaire privée mixte à Air de France (centre dans lequel il n'existe pas d'école spéciale de filles)"
cliquez sur le document pour l'agrandir
Enfin, le 1er octobre 1948, l'école primaire mixte d'application d'Air de France ouvrit ses portes dans un édifice tout neuf, remplaçant avantageusement la "petite école" publique dont les locaux étaient devenus vraiment trop exigus pour accueillir tous les jeunes élèves du village, avides de savoir et de connaissances.
Les travaux de la nouvelle école étaient à peine terminés et, les premiers jours de cette première rentrée des classes, les élèves durent passer sur une passerelle de trois madriers pour franchir les quelques cinq ou six marches qui menaient de la rue au préau et à la cour de récréation, l'escalier étant encore en cours de finition.

AIR-DE-FRANCE
CREATION D’UNE ECOLE

Notre coquet centre est, à la grande joie des habitants, enfin doté d’une école digne de ce nom.
Ce vaste bâtimenl construit d’après les dernières données de l’arcnitecture moderne et dont les plans ont été dressés par M. Jacques Bonet, architecte DPLG, occupe une superficie de 2.300 m2 environ et comprend quatre classes spacieuses où pénètrent à profusion l’air et la lumière et pouvant contenir chacune 45
élèves au moins. Quatre superbes appartements destinés à loger le personnel enseignant ; une vaste cour où pourront s’ébattre nos écoliers et pratiquer le sports; préaux d’hiver, etc...
Le premier coup de pioche fut donnéle 15 septembre 1947 par l’entreprise Fonte et Cie. L’édifice est actuellement
termine et les écoliers affluent.
Adressons nos sentiments de gratitude à la municipalité d’alors qui, sous l'împulsion de son dvnamique maire, M. Charles Jimot, œuvrait depuis de nombreuses années auprès des pouvoirs publics pour cette grande réalisation.
Nous remercions rde tout cœur M. Henri Borgeaud, conseiller général et conseiller de ,a République, qui se dépensa sans compter pour nous faire obtenir satisfaction ; il est le grand artisan de
cette réalisation

Echo d'Alger du 6 novembre 1948

AIR-DE-FRANCE

Rentrée des classes. — Tous les élèves d’âge scolaire désirant fréquenter l’école, devront être présentés à la permanence de la mairie lundi 27 septembre, de 8 h. à 11 heures, et mardi 28. de 14 heures à 16 heures. Fournir bulletin de naissance, certificat de vaccination et carte d’alimentation

Echo d'Alger du 24 septembre 1948
Autant qu'il m'en souvienne, il n'y avait que trois (ou peut-être quatre) classes ouvertes la première année.
Mais très rapidement, une puis deux nouvelles classes supplémentaires furent construites, réduisant d'autant l'espace initialement réservé au préau.

AIR-DE-FRANCE

ECOLE D’APPLICATION DE L’AIR-DE-FRANCE. — Ouverture de classe : Les élèves inscrits pour la cinquième classe de l’école d’application (classe d’initiation) devront se présenter lundi 17 octobre, à 8 heures.

Echo d'Alger du 15 octobre 1949

Ouverture de la 5ème classe en 1949

AIR-DE-FRANCE

DANS L’ENSEIGNEMENT. — Nous sommes heureux de présenter nos souhaits de bienvenue à Mme Vergnes Pierrette,institutrice, récemment, nommée à lacinquième classe de l’école d’application
d'’Air-de-France.

Echo d'Alger du 19 octobre 1949
Nommination de Mme VERGNES institutrice pour la 5ème classe

DANS L’ENSEIGNEMENT. — Bienvenue à Mme Buston et M. Darthou, Instituteurs, nommés adjoints à l’école
d’application de l'Air-de-France. à laquelle une sixième classe vient d’être créée.

Echo d'Alger du 6 octobre 1950
Nommination de Mme BUSTON et de M. DARTHOU et ouverture de la 6ème classe
Vue depuis la rue du Vivarais Les classes (à g.) et le préau (à dr.)
Le préau Les douches et les lavabos
Cliquez sur les photos pour les agrandir
Les salles de classe, destinées à accueillir des effectifs pléthoriques de 42 à 48 élèves, étaient numérotées : la 1ère classe, au fond, celle de Monsieur DÉTREZ, le directeur, avec 4 divisions d'une douzaine d'élèves (CP, CE1, CE2 et CM1), puis la 2ème classe, celle de Monsieur TRAMA à deux divisions (CM2, pour ceux qui se présentaient à l'examen d'entrée en 6ème et Fin d'Études pour ceux qui allaient se présenter au Certificat d'Essuies Primaires, la scolarité n'étant alors obligatoire que jusqu'à 14 ans !), puis la 3ème classe, celle de Monsieur ASTIER pour les CP et peut-être les CE1.
Monsieur DETREZ
Madame OLIVE, dont le patronyme évocateur déclenchait toujours gloussements et fous rires irrespecteux, avait, au début, en charge la 4ème classe, située immédiatement à droite de l'entrée de l'école. Mais il semblerait qu'elle ne resta en poste qu'une partie de l'année scolaire et qu'elle fut remplacée par Madame CHANDELIER au début de l'année scolaire 1948-49

Enseignement. — Bienvenue à Mme Chandelier, nouvellement nommée à l'Ecole d'application d'Air-de-France, en
remplacement de Mme Olive.

Echo d'Alger du 7 décembre 1948
Affectation de Madame CHANDELIER à l'Ecole d'application d'Air de France

AIR-DE-FRANCE

ECOLE D’APPLICATION. — Bienvenue aux nouveaux maitres : Mlle Saillen, MM. Leroy, Léo.
— Succès scolaires : admis en sixième . Foret Jean-Luc et Nadal Marc. :
Félicitations aux candidats et auxmaitres.

Echo d'Alger du 11 octobre 1951

Arrivée de Mademoiselle SAILLEN et de Messieurs LEROY et LEO, affectés à l'Ecole d'application d'Air de France
et réussite à l'examen de 6ème de Jean-Luc Foret et Marc Nadal

AIR-DE-FRANCE

BIENVENUE. — Nos souhaits de bienvenue à Mme Montmory, qui vient d’être nommée institutrice auxiliaire à l'école, dans la classe de fin d’études.

Echo d'Alger du 9 octobre 1954
Arrivée de Madame Montmory à l'Ecole d'application d'Air de France
Puis ce fut Madame SAILLEN, qui habitait tout au bout de notre rue (dénommée plus tard, rue du Bourbonnais), qui occupa cette classe et eut mon frère parmi ses élèves, et plus tard Monsieur CHILLAUD.
Monsieur CHILLAUD

AIR-DE-FRANCE

RENTREE. - Le directeur de l'école d'application fait connaître qu'iI inscrira samedi 29 septembre de 9 heures
à 11 heures, les élèves désirant frèquenter le cours préparatoire ou la classe d'initiation de son établissement.
Les nouveaux élèves des autres cours ne pourront être admis que le lundi 1er octobre dans la limite des places
disponibles

Echo d'Alger du 26 octobre 1951

AIR-DE-FRANCE

ÉCOLE D’APPLICATION. - M. le directeur de l'École d’application fait connaître qu'il ne procède à l'inscription des nouveaux élèves de la commune de Dély-Ibrahim que le mardi, de
16 heures à 16 h. 30.
Un cours de vacances s’ouvrira de juillet à septembre pour tous les cours.
Renseignements et inscriptions le mardi de 16 heures à 19 h. 30 auprès de M. le Directeur de l'École d’Applicatio
n.

Echo d'Alger du 4 juillet 1952

Les premiers instituteurs avaient leur logement de fonction au premier étage de l'école : Monsieur TRAMA, au-dessus des 1ère et 2ème classes, Monsieur DÉTREZ, au-dessus des 3ème et 4ème classes et Monsieur ASTIER, au-dessus du préau.
Les classes avaient lieu de 8 h à 11 h et de 13 h à 16 h, les lundi, mardi, mercredi, vendredi et samedi, le jour de congé étant, à l'époque, le jeudi. Le soir, une étude (payante) de 16 h 15 à 17 h permettait de faire les devoirs pour le lendemain, mais en l'absence de devoirs, le maître (on ne disait pas "l'instit'", à l'époque) trouvait toujours des exercices pour nous occuper : problèmes, opérations arithmétiques, dictées et, toujours, à partir du modèle calligraphié à la craie sur le tableau noir ligné "Sieyès", ces pages d'écriture, avec pleins et déliés, réalisées à la plume "Sergent-Major" et à l'encre violette qui tachait les doigts et parfois même les cahiers.

Il n'y avait bien entendu pas de cantine scolaire et pas de transports scolaires pour les élèves dui habitaient loin de l'école, comme au lotissement Baranès ou au lotissement Pascal. Ils devaient faire les trajets à pied et traverser la route de Bouzaréah avec tous les risques résultant d'une circulation certes encore restreinte mais toujours dangereuse et génératrice d'accidents dont celui dont fut victime Monique Lefébure, quelques jours avant Noël 1948.

Victime de son imprudence
une fillette est grièvement blessé
par une auto

Bouzaréa. - Lundi vers 11 h., la petite. Monique Lefébure, âgée dë six ans, sortait de l’école. Mais profitant de l’absence de sa mère qui s’était arrêtée chez un commerçant, elle traversait imprudemment la route nationale sans prendre garde à une auto qui arrivait.
La fillette fut renversée et grièvement blessée Elle a été transportée à l’hôpital de Mustapha.

Echo d'Alger du 22 décembre 1948
Ce ne fut hélas pas le seul accident sur cette route de tous les dangers, où la vitesse n'était pas limitée dans la travervée de l'aglommération et sur laquelle il n'y avait aucun passage piéton "clouté" et, a fortiori pas le moindre feu tricolore susceptible de ralentir toutes sortes de véhicules motos, automobiles, camionnettes, camions, autocars et trolleybus qui devaient faire face à l'imprudence et à l'inconscience du danger pour les jeunes enfants et adolescents comme le jeune Denis Devéza qui devait en subir les graves conséquences.

AIR-DE-FRANCE

ACCIDENT. - Les familles Torrès, Devéza, Olivès, déjà bien éprouvées par le terrible incendie de leur boulangerie, ont encore été victimes du malheur qui s’acharne particulièrement sur eux. Le
jeune Denis Devéza qui traversait la route, a été atteint par le trolleybus montant d’Alger à Bouzaréa.
Grièvement blessé, l’enfant a été transporté à la clinique où une amputation a été jugée nécessaire.
Toute la population d’Air-de-France prend part à ce nouveau coup du sort et les témoignages d’amitié affluent auprès de ces familles si cruellement meurtries.

Echo d'Alger du 16 décembre 1953
Mais revenons à la vie de l'école.
Lors des récréations, pendant lesquelles les jeux de ballons étant bien évidemment interdits, garçons et filles organisaient la plupart du temps leurs jeux de façon séparée, sans mélange des sexes. Les garçons jouaient à "tu l'as", ou, lorsqu'on avait eu le temps de s'organiser en deux camps, de forces à peu près équilibrées, à "délivrance". Selon la saison, ils jouaient aussi aux noyaux (avec des noyaux d'abricots comme décrit dans "jeux de garçons") ou aux billes, à "touche-tout" ou au "rond" dans lequel chaque joueur plaçait un même nombre de billes qu'il fallait déloger. Pour ceux qui avaient la chance d'avoir une toupie de bois (dont ils avaient eu soin au préalable de remplacer la pointe d'origine par un clou très acéré), ils la lançaient au moyen d'une cordelette pour la faire tourner le plus longtemps possible. Les filles sautaient à la corde soit seules si la corde était petite, soit à plusieurs, deux gamines faisant tourner une grande corde alors que les autres "entraient" pour sauter avant qu'il soit décider de faire "vinaigre" c'est à dire de faire tourner la corde le plus vite possible. Elles pouvaient aussi pousser en sautillant à cloche-pied, un palet, en fait une vieille boite de pastilles "Valda" remplie de terre, sur une marelle à six cases dessinée à la craie sur le sol de la cour ou sur une marelle en forme de croix de Lorraine partant de "la terre" pour atteindre "le paradis" en évitant "l'enfer".
Mais tous, garçons ou filles, devaient bien faire attention au redouté signal de fin de la récréation.
Christian Nadal Alain Ordinez Jean Suréda
Christian Nada, Alain Ordinez, Jean Suréda et X dans la cour de l'école.
Passez la flèche sur les visages, si elle se transforme en petite main, vous pourrez découvrir le nom des élèves qui ont pu être identifiés.
Car le directeur avait imposé une discipline très stricte qui s'exerçait par le truchement du sifflet qu'il tenait au bout d'une chaîne. Un premier long coup de sifflet nous imposait de nous arrêter immédiatement dans la position où nous étions, cessant tout mouvement. Lorsqu'il avait constaté que tous les élèves étaient immobiles, le directeur donnait alors un second coup de sifflet, plus court, auquel nous devions répondre en nous dirigeant calmement, sans précipitation, vers la porte de nos classes respectives en nous alignant, deux par deux, le long du mur. Alors seulement, après le rituel "entrez", nous étions fermement invités à gagner nos bancs et nos pupitres. Là, nous étions tenus de rester debout dans l'allée, attendant que le maître qui entrait toujours le dernier nous autorise à nous asseoir à notre place. Gare à celui ou celle qui ne respectait pas cet ordonnancement ! La chaîne du sifflet enroulée autour de la main du maître se déroulait immédiatement et le corps du sifflet, accéléré par la force centrifuge, venait frapper le dos, les épaules ou le bras de celui qui avait dérogé à cette discipline. Viviane Détrez, la fille du directeur, nous a confié qu'elle conserve encore, sur une étagère de sa bibliothèque, ce fameux sifflet qui a donné tant de sueurs froides à certains.
Dans la classe du directeur, où cohabitaient donc quatre divisions, la place de chacun était en réalité à géométrie variable car elle dépendait du classement mensuel de chacun : les deux places du fond de chaque division étaient occupées par le premier et le deuxième de la division, devant eux, les troisième et quatrième et ainsi jusqu'aux deux places devant l'estrade qui étaient réservées au dernier et à l'avant-dernier. Ces places étaient donc remises en cause tous les mois.
Les trois premiers de chaque division avaient des obligations, voire des prérogatives.
Celui qui avait été classé troisième devait, avant la classe, ouvrir les épais rideaux marron qui masquaient les fenêtres. Le deuxième avait la lourde responsabilité de remplir d'une encre violette, contenue dans une grande bouteille, tous les encriers de porcelaine blanche inclus dans les pupitres de sa division. C'était la tâche la plus ingrate, mais aucun n'aurait voulu y déroger (le maître l'aurait-il d'ailleurs toléré ?), car les débordements n'étaient pas inhabituels et on reconnaissait tout naturellement celui qui assumait cette charge à la délicieuse coloration violette de ses doigts (quand ce n'était pas ses mains ou même son sarrau ou sa blouse) que des astiquages énergiques à la pierre ponce ne parvenaient, au mieux, qu'à atténuer.
Enfin le premier de chaque division avait l'insigne honneur de surveiller sa division pendant les absences, brèves ou plus durables, du maître. La responsabilité suprême revenait au premier de la division des plus grands, le CM1, qui avait une prééminence sur les premiers des divisions inférieures. Ces responsables avaient à rendre compte au maître, des incartades et des manquements à la discipline survenus en son absence. Inutile de préciser qu'il était plus que souhaitable d'entretenir d'excellentes relations de camaraderie avec le premier de la division !
La journée commençait invariablement par la leçon de morale dont le thème écrit préalablement sur le tableau, n'était pas effacé de la journée. Puis c'était la lecture (sur le livre "Jeannot et Jeannette"), le calcul (tables de multiplication…, Prix de Vente = Prix de Revient + Bénéfice…, surface cultivable d'un terrain rectangulaire entouré d'allées…), la grammaire (analyse grammaticale et analyse logique…, conjugaisons…), la dictée, l'histoire "événementielle" avec ses héros exemplaires (et les héroïnes Jeanne Hachette… et Jeanne d'Arc…, les jeunes Bara… et Viala…, les chevaliers Bayard… et Du Guesclin…), la géographie, les sciences naturelles (l'air est pesant…, l'eau est un liquide incolore, inodore et sans saveur…, l'homme est un animal de l'embranchement des vertébrés et de l'ordre des mammifères…). Et chaque jour, un "cahier de roulement" confié à tour de rôle à chacun des élèves de chaque division, devait témoigner de la petite histoire de la classe. Ce journal de la classe requérait donc le plus grand soin de celui qui en avait la charge pour la journée et qui se devait d'éviter les ratures et les malencontreux pâtés d'encre violette que ni la gomme spéciale (qui finissait par faire des trous dans le papier) ni le Corrector (qui effaçait aussi les quadrillages et fragilisait la feuille) ne parvenaient vraiment à estomper.
Parfois, par ennui, par lassitude ou par désintérêt, certains élèves ayant un moment d'absence, s'endormaient en classe (et pourtant, il n'y avait pas encore la télévision qui aurait pu nous empêcher d'avoir des nuits complètes de sommeil !). Malheur à celui qui succombait à ce besoin ! Viviane Détrez se souvient très bien de la punition immédiate qui sanctionnait de trois tours de cour, en courant, ce manquement grave à la discipline. Et, bien entendu, les autres élèves de la classe, et même ceux des autres classes ne manquaient pas de se moquer de l'endormi, à sa plus grande honte
Outre le quotidien des cours magistraux, le maître nous emmenait à l'occasion en promenade pour l'après-midi. Grâce à ses relations privilégiées avec un adjudant de gendarmerie, jovial et d'un embonpoint respectable, qui, au chenil de Béni-Messous, avait la charge de l'hébergement et de l'apprentissage des chiens "policiers" de la Gendarmerie Nationale, nous avions, une ou deux fois par an, le privilège d'assister à une démonstration d'exercice de ces bergers allemands : parcours d'obstacle, recherche de pistes, simulation d'attaques du maître-chien par un collègue déguisé en malandrin mais protégé par un caparaçon d'épais tissu matelassé dans lequel les canines du molosse laissaient des traces visibles. Inutile de dire la forte impression que laissaient, aux bambins que nous étions, ces spectacles, à une époque où les représentants de la force publique étaient considérés par tous avec un respect mêlé de crainte.

Parfois, par une belle journée de la saison des pluies, ces promenades nous menaient, au-delà du chenil de la gendarmerie, sur la route de l'hôpital, à un endroit où Monsieur DÉTREZ avait repéré un gisement d'argile, de terre glaise comme nous disions. Nous amenions alors une ou deux petites lessiveuses en tôle étamée dans lesquelles nous rapportions à l'école quelques kilogrammes de cette terre glaise, rendue malléable par l'humidité de récentes précipitations. Au retour, cette matière était précieusement entreposée dans un petit local de l'école et servait modeler des cartes de géographie en relief, avec montagnes et vallées, falaise et rivages sablonneux, sur lesquels on râpait de la craie de couleur bleue, pour les mers et les cours d'eau, verte pour les forêts, jaune pour le sable. Il y avait parmi les élèves du CM2, un spécialiste de ces modelages, un dénommé Sid-Ali qui organisait le trempage de l'argile, le façonnage du relief et du littoral et qui se réservait le droit de râper la craie sur la carte de la région ainsi réalisée. Inutile de préciser, qu'au sortir de cet exercice nous étions d'une saleté repoussante, faite d'un mélange de terre et de craie. Aussi, lorsqu'une telle activité était prévue, le maître ne manquait pas de nous en avertir afin que nos parents nous vêtissent de tabliers, blouses ou sarraus usagés et qui ne risquaient rien. C'était, je crois, un excellent moyen de nous faire apprendre la géographie de cette France que nous ne connaissions que par les grandes cartes cartonnées de la Librairie Colin ou de Vidal & Lablache, accrochées aux murs des classes et dont nul ne pouvait alors imaginer que nous y débarquerions, quelques années plus tard, chassés par le "vent de l'histoire" et par la malhonnêteté intellectuelle et le machiavélisme des hommes politiques de tous bords. Mais ceci est une autre histoire…
Pour nos activités d'éveil, il nous était accordé certains après midis de jouer à des jeux à forte charge pédagogique comme le "Loto de l'Histoire" où, à l'annonce de la date inscrite sur un petit carton, nous devions, si cette date figurait sur notre carte individuelle de jeu, donner la réponse qui correspondait à cette date historique. C'était aussi un moyen ludique de nous faire apprendre ou réviser notre Histoire de France et cela fonctionnait bien car, après quelques parties, il n'était pas rare que certains donnent, de mémoire, la réponse alors qu'elle ne figurait pas sur leur carte personnelle : bien sûr les traditionnels "1515 ?", "Bataille de Marignan", "1610 ?", "Assassinat d'Henri IV par Ravaillac" et "800 ?", "Couronnement de l'Empereur Charlemagne", mais aussi les moins évidents "18 octobre 1685 ?", "Révocation de l'Édit de Nantes", "27 juillet 1214 ?", "Bataille de Bouvines" pour ne pas parler du "1559 ?", "Paix de Cateau-Cambrésis". Mais, là encore, c'était l'histoire de la France qui nous était enseignée, pas celle de l'Algérie où nous vivions et où nos familles étaient, pour certaines, établies depuis 4 ou 5 générations.

Et tout cela nous amenait à passer avec succès les examensd'entrée en 6ème ou à obtenir le Certificat d'Etudes Primaires.
Les succès aux examens

AIR-DE-FRANCE

EXAMENS. — Nous apprenons avec plaisir le succès au certificat d’études des élèves de l’Ecole d’application : Pérez François, Laïchaoui Mohamed, Poisot Gabrielle. Félicitations à ces élèves
et; aux maîtres qui les ont préparés.

Echo d'Alger du 2 juin 1949

Certificat d'Etudes Primaires 1949
succès de François Pérez, Mohamed Laïchaoui et Gabrielle Poisot

AIR-DE-FRANCE

SUCCES SCOLAIRES. — Les élèves dont les noms suivent ont brillamment passé l’examen d’entrée en sixième : Lellouche
Irène ; Sendra Gabrielle ; Rodriguez Denise. Félicitations.

Echo d'Alger du 17 juin 1949

Examen d'entrée en Sixième 1949
Succès de Irène Lellouche, Gabrielle Sendra et Denise Rodriguez

AIR-DE-FRANCE

SUCCES SCOLAIRE. — Mlle Jacqueline Trigano, de l’école d’application, a passé avec succès le concours d’entrée au cours professionnel de couture, coupe et art ménager du collège Lazerges. Félicitations.

Echo d'Alger du 3 juillet 1949

Succès de Jacqueline Trigano au Concours d'entrée au cours
professionnel de couture, coupe et art ménager 1949
AIR-DE-FRANCE

SUCCES SCOLAIRE. — Nous apprenons avec plaisir que les élèves Danièle Detrez et Claude Fougerousse, ae l'école d'application de l'Air-de-France.viennent d'êtres reçues à l'examen d'entrée en sixième. Tous nos compliments.

Echo d'Alger du 13 octobre 1950

Examen d'entrée en Sixième 1950
Succès de Danièle Détrez et Claude Fougerousse

AIR DE FRANCE

SUCCÈS AUX EXAMENS. — Liste des élèves de l’école d’Air-de-France reçus au certificat d'études primaires le 4 juin à El-Biar : Allard Jeanine, Ferrier Michel, Bouchama Ahmed, Masserini
Elisabeth, Oussedik Nadia et Walter Serge, soit un total de 6 reçus sur 8 présentés.
Tous ces élèves sont titulaires du brevet sportif scolaire.
Félicitations aux candidats ainsi qu’a
ux maîtres qui les ont présentés.

Echo du 10 juin 1954

Succès à l'examen du C.E.P. 1954

AIR DE FRANCE

SUCCÈS SCOLAIRES. — Liste des candidats et candidates ayant réussi à l'examen d’entrée en sixième : Bensahin J., Lerov M., Diez N., Forga C.
Liste des candidats et candidates ayant obtenu le brevet sportif scolaire en 1954 : Bagui P., Ordinez M., Domenech A., Oussedik N., Aïmouche A., mention assez bien : Lebib B. (AB), Hamadi M. (ABl, Ben Abdi Lyès (AB) Bensada N., Fournié G., mention très bien, et Dendane A. mention très bien
Brevet sportif populaire : Benabdi, Dendane, Hamadi, Lebib, Aïmouche Aïcha.
Signalons la belle performance de Fournié Gilbert qui passa 1 m. 18 au saut en hauteur et celle de Dendane Azeddine, qui franchit 1 m. 22 dans un très beau style.
Félicitations aux candidats et aux maîtres qui les ont préparés.

Echo d'Alger du 17 juin 1954

Succès à l'examen d'antrée en 6ème, du brevet sportif scolaire et du brevet sportif populaire 1954

AIR-DE-FRANCE

EXAMENS. — Viennent d’être reçus à l’examen d’entrée en 6e Claude Elie, Lisette Mourjan, Leila Bourboune, Jacqueline Saurier, Renée-Clalre Ruas.
Nous leur présentons nos compliments, ainsi qu'à leurs dévoués maîtres.

Echo d'Alger du 19 octobre 1954

Succès à l'examen d'antrée en 6ème
Coupure (une relique !) du "Journal d'Alger" de juin ou juillet 1952, consacrée aux élèves de l'école mixte d'application d'Air de France reçus au Certificat d"Études, au Concours d'entrée en 6ème et aux Brevets Sportifs Populaire et Scolaire. Certains de la liste des "retrouvés" y verront peut-être leur nom ou celui d'un frère ou d'une sœur ou d'un copain.
Facture pour un portique et 6 crochets
(vraisemblablement destinés à être installés dans la cour de l'école) en date du 10 décembre 1959
(merci à Bernard Venis)
La Caisse des Ecoles

AIR-DE-FRANCE

CAISSE DES ÉCOLES. - L’assemblée générale du 2 décembre a procédé au renouvellement du bureau.
Ont été élus à l’unanimité :
Président : M. Casanova, maire ; vice-présidents : Tabet et Santini ; trésorier : Détrez ; secrétaire : Mme Delucinge ; adjointe : Mme Détrez ; assesseurs : Mme Boyer, MM. Nadal, Vitiello, Galouze ; conseillers : Mme Sefariello et Forêt, MM. Espitalier, Laïchaoui, Elie, Milandre et Roubas.

Echo d'Alger du 14 décember 1950

En 1954 l'école ouverte en 1948 se révélant, 6 ans plus tard, malgré la création d'une 5ème puis d'une 6ème classe, déjà insuffisante pour assurer la scolarisation des enfants de plus en plus nombreux en raison de l'extension du quartier. Un comité créé pour la défense des intérêts d'Air de France, a parmi d'autres exigences, demandé la suppression des classes à mi-temps, la création d'une école de filles ou l'agrandissement de l'école actuelle.
Ces demandes ne seront que partiellement satisfaites, quelques temps plus tard, probablement à la rentrée d'octobre 1957, par la construction d'une école en préfabriqué à l'angle de la route de Béni Messous et de la rue du Valois

AIR-DE-FRANCE

COMITE PROVISOIRE DE LA DÉFENSE DES INTÉRÊTS D’AIR-DE-FRANCE. — Communiqué : Au cours de la réunion d’information tenue le 9 octobre 1954 dans l’annexe de la mairie d’Air-de-France, le comité provisoire de la défense des intérêts d’Air-de-France a été ainsi constitué :
Président. M. Pierre Espitalier ; vice-présidente, Mme Saillen Yvonne ; secrétaire général, M. Léon Roubache; adjoint, M. Raïs Rachid ; trésorier, M. Merel Raymond ; assesseurs. MM. Ripoll Jean, Lasnami El Hadj, Boudjemaà Kader.
Ce comité provisoire fait appel à toute la population d'Air-de-France, à tous les parents d'élèves de bien vouloir assister à la réunion que notre comité, organisera le samedi 23 octobre. à 18 h. 30 préc:ses, dans l'annexe de la mairie d'Air-de-France.
Nul n’ignore les difficultés rencontrées pour la scolarisation de nos enfants. difficultés qui augmenteront encore l'an prochain.
Après échange de vues avec M. le Directeur de l’école d’Air-de-France, nous nous sommes rendus compte qu’il était matériellement impossible d’envisager l’inscription d’autres élèves.
Én conséquence, nous demandons à tous les parents d'élèves et amis de l’école de vouloir bien assister à cette assemblée générale afin d’apporter leur concours aux membres de notre comité en faisant part de toute suggestion susceptible d’être favorablement examinée.
A cet effet, nous serions désireux de voir supprimer les classes fonctionnant à mi-temps qui lèsent l’instruction de nos enfants, et aussi la création d’une école de filles ou l’agrandissement de l’école actuelle.
Il est un devoir pour chacun de comprendre combien ces problèmes engagent l’avenir de nos enfants et qu’il faut dès à présent envisager les rentrées prochaines.

Echo d'Alger du 20 octobre 1954

Et après 1962 ?
Allez voir les photos de notre école en 2004, que les sœurs Oussedik ont prises lors d'un voyage à Air de France !


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Christian Nadal Alain Ordinez Jean Suréda